Les nouveautés sur le site
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• Cela s'est passé un... Semaine du 28 avril au 5 mai (ci-dessous).
• L'extrait du mois :
- « L’artisan », Tu, Seuil, 1978, p. 400 ; Œuvres complètes, vol. II, L’Âge d’Homme, 2003, p. 702.
- « Créer pour rompre », Choses dites, DDB, 1970, p. 110-111.
• « The power of the poet », The Atlantic, n° 187, janvier 1951, p. 74-77.
• 28 novembre 2019 : décès de M. François Livi, exécuteur testamentaire du poète et président du Centre de recherche. Cf. colonne de droite (Centre de recherche).
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Mme Catherine Emmanuel Carlier, présidente de l'Association des Amis de Pierre Emmanuel, lui rend ici hommage.Chers Amis,
La nouvelle de la mort de François Livi nous a tous bouleversés, il est parti trop vite, trop tôt.
Au fil du temps nous avions appris à le connaître. Nous aimions son humour, la qualité de son écoute, son humilité, sa bienveillance.
Parfois, il se plaisait à nous raconter sa première rencontre avec Pierre Emmanuel, en 1966 rue de Varenne, alors qu’il était un tout jeune étudiant et comment très vite ils se lièrent d’une profonde amitié. Une amitié qui ne s’est jamais démentie.
François Livi exécuteur testamentaire de Pierre Emmanuel fut le président du Centre de recherche, crée en 1986. Il a beaucoup œuvré, avec tous les membres du Centre, à la connaissance et à la mémoire du poète et nous lui en sommes très reconnaissants.
Comme il va nous manquer lui qui nous a tant donné et tant appris !
Catherine Emmanuel Carlier
Présidente de l’Association des amis de Pierre Emmanuel
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• Des nouvelles dans "On en parle...", colonne de droite: livres, émissions et articles nouveaux sur Pierre Emmanuel.
• La lettre de l'Association des Amis de Pierre Emmanuel et le bulletin d'adhésion 2019. Merci aux généreux donateurs !
• IMPORTANT : Les photos, textes et autres documents de ce site ne sont pas libres de droit, ceux de Facebook ou des affiches non plus.
• Rappel : les liens sont visibles lorsqu'on passe sur le texte.
Le mot de l'Association
Depuis sa création, en 1985, l'Association s'est attachée à servir la mémoire de Pierre Emmanuel et à faire connaître son œuvre en apportant son soutien à des publications, rencontres, expositions, émissions radiophoniques et à différents hommages en France comme à l'étranger.
La création d'un site Pierre Emmanuel s'est imposée comme une évidence et une priorité. Un nouvel outil pour retracer l'itinéraire de l'écrivain, du poète et de l'homme d'action engagé dans son siècle en faisant découvrir ses multiples visages : l'homme de culture, son action auprès des médias, mais aussi l'homme de foi, l'homme courageux, le résistant, le défenseur des droits de l'homme.
C'est un travail énorme qui fut engagé, un travail exigeant et rigoureux mené par Anne Simonnet (*) aidée dans ses recherches par des témoins de la vie de Pierre Emmanuel, par le Centre de recherche et par la famille du poète. Une approche aussi complète a nécessité des années de consultation dans les archives de la BNF, de l'Imec, l'Ina, et d'autres fonds. Des manuscrits, des photographies, des lettres et des documents souvent inédits, prêtés par des amis, des proches ou d'anciens collaborateurs de Pierre Emmanuel ont considérablement enrichi le site.
Pierre Emmanuel visionnaire, initiateur et créateur de la Vidéothèque (Forum des Images), confiant dans les nouvelles technologies, aurait certainement apprécié l'instrument de connaissance, de dialogue et d'échange que constitue un tel site.
Proposer un site clair, lisible, complet et accessible à tous, telle fut notre démarche pour que Pierre Emmanuel reste vivant dans les mémoires.
Catherine Carlier, Présidente de l'Association
(*) Anne Simonnet est professeur de Lettres classiques, Docteur ès Lettres, auteur de l'ouvrage Pierre Emmanuel, poète du Samedi saint et d'une thèse : Le Christ de Pierre Emmanuel. L'élaboration d’un mythe personnel.
Cela s'est passé un... (La micro-information du jour)
28 avril
28 avril 1970
Diffusion de l’émission radiophonique « Votre jardin secret » consacrée à Pierre Emmanuel sur France Inter. Pierre Emmanuel évoque l’origine de sa vocation de poète fait un éloge de Pierre Seghers, précise ce qu’est la poésie pour lui (6’35 ») et dit un extrait de Jacob (2’10 »). « Ah, je regrette, Madame, de vous décevoir : j’ai en effet écrit beaucoup de livres pour essayer de définir la poésie, ou plus exactement la fonction du poète, en particulier le rapport entre cette fonction et d’autres fonctions de la pensée, il n’est pas possible de donner une définition de la poésie en quelques mots, mais je crois tout de même que contrairement à ce que pensent beaucoup de gens, ce n’est pas simplement une façon de dire, une façon d’orner des pensées et des sentiments, une sorte d’artisanat supérieur du langage, c’est véritablement une façon de penser. On pense en poésie, on pense poétiquement comme on pense philosophiquement ou scientifiquement. On aborde la réalité d’une certaine manière et tout est question de définition de l’imagination créatrice. En fait l’imagination créatrice n’a rien à voir avec ce que nous appelons la fantaisie. »
29 avril
29 avril 1955
« Hitler est-il bien mort ? », article de Pierre Emmanuel dans Témoignage chrétien, n° 564, p. 2. « [Hitler] fut le fossoyeur de l’Europe ; la guerre totale est née de lui ; il nous a imposé le dogme de la justification par la force. Il nous a enseigné des méthodes de terreur dont la société post-hitlérienne sait faire usage, hypocritement, clandestinement sans doute, mais dont elle se servirait à ciel ouvert, le temps venu. Il nous a saturés de mensonge : il a atrophié notre sens du bien et du mal. Nous avons vu les “bons”, à Yalta, porter des toasts de sang aux massacres, et trancher dans la chair des peuples, allègrement. Tout souci de vérité humaine a disparu de l’histoire : nous sommes devenus des “réalistes”, qui ne s’embarrassent de morale que quand elle est utile dans la présentation des faits. La grande victoire de Hitler, c’est que nous fassions rire, en parlant de morale absolue. En un sens, il a rendu la morale absurde, et perverti son langage pour longtemps : mais il l’a aussi démystifiée en démasquant ce qui était caché – notre faiblesse, notre inconscience, notre tartufferie, notre impuissance à l’incarner. Que la morale est un tout, ou bien elle cesse d’être. »
30 avril
30 avril 1960
« Un poète répond au critique : Ce que nous cherchons ? Redonner sa pleine dignité à la parole », article de Pierre Emmanuel dans Le Figaro littéraire, n° 732, p. 1-2. « Avant de faire de nous les contemplatifs d’une religion de l’immanence, il conviendrait de faire le compte de toutes les raisons négatives qui nous conditionnent moins à la contemplation qu’à une certaine passivité. Il y a dans la vocation poétique une racine de faiblesse qui fait de nous des exilés à l’intérieur : bien souvent, c’est nous en faire accroire que de nommer contemplation ce refus du monde tel quel. Est-il besoin de dire que nos exercices n’ont rien à voir avec la discipline mystique ? Notre mysticité est aussi vague que notre philosophie. Je ne dis pas que cette faiblesse devant le monde et la souffrance de l’être qu’elle nous cause de plus en plus avec l’âge ne sont pas un terrain favorable à une meilleure compréhension de la vie psychique et des valeurs que crée l’esprit. Au contraire, à condition que la faiblesse soit surmontée et changée en force. Alors nous pourrions nous compter parmi les instruments de la conversion spirituelle que l’homme moderne attend obscurément. Mais tant que nous resterons repliés sur notre spiritualité indigente, incapables de dire tout l’homme et d’adapter notre langage à l’ensemble dramatique de la réalité, nous fabriquerons du pseudo-sacré pour une élite elle-même exsangue. »
1 mai
1 mai 1981
René Couderc, « Vie poétique », L’École libératrice, n° 26, 1 mai 1981, p. 5. « Celui qu’Albert Béguin, dans sa présentation, en 42, classait si justement parmi “Les poètes de la grande abondance, usant de toute la richesse du langage… préférant ces mots qui ont un poids de chair et de sang”, celui-là, le lecteur le sait, est devenu autre en esprit du moins autre, par la forme. L’expression, maîtrisée, ordonnée, contenue, s’intellectualisant, a renoncé à ce qui aurait parfois évoqué une première vase, un premier limon dans lesquels grouillait une vie nouvelle et, elle aussi, première, gorgée de sang, de semence et de future lumière. Une longue et étudiée démarche a conduit ce poète à s’écarter d’un baroquisme à la structure torrentielle – on ne parlait pas de lui sans évoquer Agrippa d’Aubigné. Il a renoncé à une étonnante crue du verbe pour tenter de mieux traduire la clarté du croyant acharné à dire l’inexprimable, frôlant sans cesse l’impossible, l’intransmissible.
L’Autre vient après Una, après Duel et les cent soixante douzains qui le composent (dix décasyllabes couronnés par deux alexandrins, dont certains compteront parmi les plus beaux de notre langue) tracent un chemin vers une lumière. »
2 mai
2 mai 1964
« En chemin », article de Pierre Emmanuel dans Réforme, n° 998, p. 10. « Le poète espagnol Dionisio Ridruejo vient d’être arrêté à Madrid. Il était de cette centaine d’Espagnols qui, aux côtés de leurs compatriotes, avaient assisté, en juin 1962, au Congrès du Mouvement Européen à Munich. Le gouvernement du général Franco en avait pris ombrage, et donna le choix aux congressistes entre l’exil et la résidence forcée aux Canaries. Dionisio Ridruejo resta donc à Paris près de vingt mois, consacrés sans doute à la méditation politique dans un climat moins étouffant que celui de Madrid.
Mais le sens qu’il avait de sa responsabilité à l’égard d’un pays où les élites de toute espèce sont rares, et les gens de sa trempe encore plus, l’a conduit à repasser la frontière clandestinement, comme il était venu, et .à rejoindre son domicile madrilène. Avisée sans doute de son dessein, la police surveillait l’immeuble. Elle lui a fait grâce d’une nuit de sommeil, et l’a conduit à la Sûreté le lendemain de son retour. »
3 mai
3 mai 1972
Diffusion d’une émission radiophonique dans la série « Indicatif futur » de France culture : « Prospective du développement culturel ». « Ce qui risque de se produire, dans cet effort vers la civilisation nouvelle, c’est que, un certain nombre de spécialistes, précisément, et de spécialistes du futur, s’emparent de l’idée pour lui donner une structure purement intellectuelle. Et que, par une terminologie appropriée, ils fassent de ce mot “culture”, un mot vide de sens pour la plupart d’entre nous, alors qu’il devrait avoir, et qu’il doit avoir un sens de plus en plus plein, le sens d’une relation universelle à créer ensemble. C’est pourquoi je souhaiterais que dans toute les activités préparatoires à cette vision du monde de demain, que la fondation européenne de la culture a l’ambition d’ébaucher, d’ouvrir devant nos yeux, soient associés, mais vigoureusement associés, des artistes. Car eux, s’ils ne sont pas des hommes d’une spécialité, s’il leur manque le langage de cette spécialité et peut-être la science qui permet, jusqu’à un certain point la prévision, et qui nous sollicite à une supputation de ce que sera notre avenir, les artistes voient. »
4 mai
4 mai 1968
André Marissel, « Un homme de parole : Pierre Emmanuel », Réforme, p. 14. « Aujourd’hui, en 1968, l’œuvre et le témoignage de Pierre Emmanuel paraissent pourtant plus modernes que ceux des athées vindicatifs des années 50 : n’ayant, selon ses propres termes, rien renié de son ambition, qui “est de comprendre l’actuel et l’éternel, l’homme intérieur et l’homme-univers, le bourreau et le saint, l’enfer de la douleur et le ciel de la louange”, Emmanuel a révélé que par la poésie et par une intuition de tous les instants, le monde invisible et le monde visible, l’homme immortel et la créature angoissée cessaient d’être divisés. Grâce au Langage — non pas un instrument mais l’être même de l’homme — un Espoir redevenait possible, en dépit du déprimant climat d’exil et des conflits que la “civilisation” procure. »
5 mai
5 mai 1976
Enregistrement d’une émission radiophonique de la collection « La littérature du… » dans « Les matinées de France culture » à propos de La vie terrestre. « [L]es textes de circonstance ont l’avantage de mettre celui qui parle en face d’un public ; et ce public l’aide beaucoup à dire. Car il ne dit pas que pour lui, il dit en fonction de ce public qui l’écoute et dont la manière de l’écouter souvent détermine ce qu’il va dire. Il y a une sorte de sympathie qui se crée, même une énergie commune qui se dégage finalement.
C’est vrai que d’une certaine façon je suis beaucoup plus anonyme que personnel. J’ai tendance, par nature, à me fondre dans la multitude, enfin dans le groupe ou même dans la multitude. Et je me sens relativement plus à l’aise devant eux que devant l’interlocuteur individuel, parce que pour l’interlocuteur individuel il faut souvent trouver le lieu de la sympathie. Cela ne se fait pas nécessairement immédiatement, et si cela ne se fait pas tout de suite, on ne parle que de choses assez vaines et assez superficielles. Lorsqu’on est en face d’un groupe c’est différent : il y a véritablement une aimantation, une résonance : le groupe sert de résonateur à la pensée propre et d’une certaine façon la pensée propre s’accorde à celle du groupe. »