Dans les années qui séparent L’honneur de Dieu de Visage nuage, Pierre Emmanuel écrit une pièce qui restera dans ses cartons : Les Psaumes de la nuit. Le mythe du roi pêcheur qu’elle reprend et interprète permet au dramaturge de montrer la victoire de la croix sur les tyrans de ce monde, au moment même où ces derniers pensent avoir vaincu les pauvres.
La pièce est précédée d’une note au lecteur et au spectateur dans laquelle Pierre Emmanuel justifie le lyrisme de certaines scènes, la teneur de certains dialogues, expliquant qu’il s’agit là d’un « théâtre verbal », « un théâtre d’éclatement, invraisemblable certes, mais prophétique », d’une « fresque animée un peu à la manière des dialogues désintéressés et souvent gratuits d’un Socrate qui interpelle les passants, mieux encore, à la manière (…) d’un Saint Paul prêchant dans Athènes ». La pièce est en outre suivie d’un épilogue dans lequel le dramaturge prend congé de ses personnages et s’adresse directement aux « Hommes » des temps modernes, supprimant ainsi la distance entre l’écrivain et le lecteur. La modernité de l’écriture, l’audace de la mise en scène qu’elle suppose marquent cette pièce caractérisée aussi par une plus grande place accordée aux dialogues et la disparition du vers encore utilisé dans L’honneur de Dieu.